Au coeur du don d’organes : l’infirmière coordinatrice de prélèvements

Au coeur du don d’organes : l’infirmière coordinatrice de prélèvements

Découvrons le métier d’infirmière de coordination en prélèvement d’organes et de tissus
à travers les témoignages de Karine Bernard à Beaujon et Dorothée Moncel à Bichat.

Infirmière de coordination«Infirmière en salle de réveil, j’étais amenée à rencontrer des patients en état de mort encéphalique et il m’est arrivé d’avoir en charge des donneurs potentiels. Je me suis alors intéressée à la question des prélèvements d’organes et j’ai suivi une formation de l’Agence de Biomédécine. J’ai eu ensuite l’opportunité de rejoindre la coordination de prélèvements… je me suis lancée ! Lorsqu’un patient en état de mort encéphalique est signalé à la coordination, je suis tous les bilans avec la réanimation afin de monter le dossier du donneur. Une fois que toutes les procédures sont validées par l’Agence de Biomédecine et que nous savons quelles sont les équipes qui vont intervenir par organes, je dois organiser les blocs opératoires en fonction. Il faut savoir qu’il y a un ordre de prélèvement, et que les différentes équipes sont planifiées en fonction des organes prélevés, ce qui peut parfois paraître long pour des équipes en alerte. Souvent, ces temps d’attente créent des tensions, aussi c’est mon rôle de temporiser. L’activité de prélèvement est très légiférée, ce qui nécessite d’être très organisée. Il y a énormément de règles de bonnes pratiques qui s’y rapportent. Et évidemment on a beaucoup de « paperasse » ! Tout est tracé. Il s’agit d’organes… c’est logique ! Quand je rentre au bloc, je veille au bon conditionnement des organes, je m’assure que les comptes rendus opératoires soient faits et je veille également à la reconstruction du corps avant restitution. C’est une étape importante et les chirurgiens sont extrêmement respectueux des donneurs. Je laisse toujours le numéro de téléphone de la coordination aux familles mais je ne m’impose pas. Certaines ont besoin de faire leur deuil rapidement et veulent oublier le don. D’autres veulent que je les appelle après pour savoir ce qui a été prélevé. Je sens qu’il y a des questions importantes auxquelles je dois répondre. Il est donc essentiel que les choses soient claires au maximum pour les proches. L’infirmière de coordination est là du début à la fin du prélèvement pour leur garantir que tout soit fait dans les règles en respectant leur volonté. »

Karine Bernard, infirmière coordinatrice Beaujon

Jeune infirmière depuis 4 ans en réanimation médicale, Dorothée est comme Karine confrontée à des patients en état de mort encéphalique. Décidée elle aussi à s’occuper de prélèvements d’organes, et après avoir rencontré les équipes de Beaujon pour voir comment cela se passait, elle attendait depuis plus d’un an de rejoindre la nouvelle équipe de coordination de Bichat. C’est chose faite depuis octobre 2010. « Pour reprendre la phrase de l’un des réanimateurs, le prélèvement d’organes est parmi les choses les plus nobles que l’on fait en médecine. Le don d’organes est un don tellement altruiste puisque complètement anonyme et complètement dénué d’intérêt. C’est noble et cela mérite un investissement énorme. Je suis très motivée pour tout cela. Cette activité me permet de rencontrer beaucoup d’acteurs dans chaque discipline. Lorsque je prends en charge une situation de soins concernant un donneur potentiel, je suis amenée à être en contact avec des personnes différentes : les familles, les équipes de l’Agence de Biomédecine, les chirurgiens préleveurs de plusieurs autres hôpitaux, les autres coordinateurs, mais aussi parfois les médecins traitants, ou les autorités judiciaires. Tous ces échanges sont vraiment intéressants et très enrichissants sur un plan professionnel et personnel. Tout le monde est là dans un même but : prélever des organes pour sauver des vies. Faire partie d’une telle équipe, c’est quelques chose de très beau et de très émouvant. A mon humble niveau, je contribue à faire avancer le don d’organes en France. Etre infirmière en coordination, c’est aussi découvrir le mode de fonctionnement d’un hôpital. Quand on est au bloc opératoire avec des équipes qui peuvent venir des quatre coins de l’Hexagone, c’est beau de voir toute cette collaboration des équipes au plan national. Il s’agit de tout mettre en oeuvre pour que le prélèvement se passe bien, mais il faut aussi prendre en charge une famille. Il ne faut pas oublier le lien avec les proches des donneurs qui n’est pas toujours évident dans un tel contexte. Il peut y avoir des histoires plus difficiles que d’autres mais on apprend beaucoup de ces entretiens. Cela permet parfois d’avoir une petite leçon de vie. » Pour Dorothée, la fusion avec la coordination de Beaujon est l’opportunité de travailler avec des personnels qui ont beaucoup d’expérience. « Cette équipe a pris en charge de nombreux prélèvements d’organes et elle est bien organisée. A Bichat, étant donné que c’est une équipe qui démarre, cette fusion me permet de débuter dans les meilleures conditions possibles en collaborant avec des gens d’expériences et de grande qualité. Je voudrais essayer de faire aussi bien à Bichat que mes collègues font à Beaujon. »

Dorothée Moncel, infirmière coordinatrice Bichat

Interview réalisée en 2011 pour le journal interne des HUPNVS